Reflexion japonaise 4

Sagesse perdue

J'erre de bon matin au Meiji-Jingu, bloc d'arbres au milieu d'une forêt de béton. Un mariage passe, la mariée dans une bulle blanche, le marié éventail à la main. Je prends une photo. Pris de terreur, je relève la tête et regarde autour de moi, je reconnais exactement le décor, je connais cette scène.
Quand suis-je devenu Scarlett Johansson ?
Je me rappelle en 2004 Carole en pleurs à la sortie du cinéma. Moi impuissant, je ne comprenais  pas cette épanchement. Je n'étais pas perdu. Maintenant je comprends. Ai-je trouvé la traduction ?
Conclusion.... Je quitte le parc, je fuis, retourne dans un monde de bruits, de néons et d'écrans LCD. Ronronnement de trente millions d'habitants, ronronnement rassurant.
La foule de Shibuya m'entoure. Fœtus dans le liquide amniotique d'un monde différent, j'ai envie de renaitre.
L'herbe est la même partout, dit-on, pourtant je n'ai jamais vu de pelouse si bien entretenue que dans les parcs de Tokyo. Les clochards ont une moquette de premier choix alors que les joggers les dépassent, corsetés de marques, ipods derniers cris enfoncés dans les oreilles, ne voulant pas voir de fantômes. Eux sereins, semblent s'en moquer, invisibles, ils enlèvent leurs chaussures et rentrent dans leurs habitats de bâches bleues.
Quel monde étrange, l'étranger doit lui aussi rentrer mais gardera ses chaussures pour monter dans l'avion.